Un problème général
Le problème
ne se pose pas qu’au niveau de l'Ecole Aqueduc mais de façon beaucoup plus
générale. L'Ecole manque cruellement de moyens, nous sommes très loin d'une
situation idéale. Les ZEP, notamment grâce au plafonnement du nombre d'élèves
par classe ne sont qu’un tout petit peu moins loin d'une situation normale.
Concernant
les effectifs en primaire, la moyenne OCDE est de 21 élèves par classe,
l'Education Nationale annonce des moyennes nationales à 26 en maternelle
et 23 en élémentaire pour 2013. Comment accepter que des établissements
accueillant des enfants "défavorisés" (au sens éducation nationale du
terme), dont les capitaux sociaux, culturels et économiques sont en dessous de
la moyenne, aient des classes plus chargées et soient privés de moyens qui ont
démontré leur efficacité dans la lutte contre le déterminisme social. Ce,
d'autant plus que la taille des classes a un impact direct sur la réussite
scolaire.
Voir le site le l'Observatoire des Zones Prioritaires et l'étude de Thomas Piketty et Mathieu Valdenaire disponible sur le site de l'Education Nationale
La mixité
Contrairement
à ce que l'on entend, notamment pour justifier la sortie du Collège Valmy du
dispositif, la mixité n'est pas, dans notre arrondissement, une situation
stable. Il faut du temps pour l'installer et beaucoup moins pour la voir
disparaître. Les catégories défavorisées sont captives, elles ne maîtrisent pas
les codes de l’Ecole, n’ont pas la connaissance ni les moyens nécessaires à la
mise en œuvre des nombreuses possibilités de contournement. A l’inverse, les
catégories favorisées sont les plus volatiles. L’attractivité d’un
établissement a donc un impact direct et rapide sur la mixité.
Ainsi, le
statut ZEP n'est pas seulement un outil pour installer la mixité, c'est aussi
ce qui permet de la maintenir. Même si M. Algrain a, à juste titre, fait
modifier sa citation sur le site internet du Nouvel Observateur, nous ne
sommes pas d'accord avec cette notion de "point de bascule" invoquée
par le rectorat et nous sommes curieux de connaitre les éléments qui supportent
cette analyse.
Si le collège
Valmy n’est pas en REP, les conditions d’enseignement vont inévitablement s’y
dégrader : des classes plus chargées, moins d’accompagnement pour les
élèves en difficulté, le sacrifice de nombreux projets pédagogiques, un risque
pour la stabilité des équipes. Comment affirmer que ces évolutions inéluctables
n’auront pas d’impact sur l’attractivité du collège ?
Méthodologie du classement :
prendre aux pauvres pour donner aux pauvres ?
Sur la
méthode, le postulat de l'enveloppe fermée est une erreur fondamentale. Mettre
les moyens sur les zones les plus défavorisées est nécessaire, récupérer ces
moyens sur le dos d'établissements "moins défavorisés" est aberrant.
Voir l'article de Louise Tourret "ZEP: prendre aux pauvres pour donner aux pauvres" sur Slate.fr
A part à la
marge, aux erreurs de métrique près, personne ne peut contester le classement
fait par l'Education Nationale. La Seine Saint-Denis est infiniment plus
défavorisée que Paris et nécessite d'autant plus de moyens. De même, dans
Paris, le 19e est dans une situation plus critique que le 10e... Mais cela ne
veut pas dire que le 10e n'a pas de besoins. Nous ne sommes pas dans une
logique rationnelle mais dans une simple répartition de la pénurie.
Le Rectorat
nous enferme ainsi dans une situation intenable : comment nous plaindre de
perdre nos "avantages" puisque d'autres en ont "vraiment"
besoin (en tout cas plus que nous) ?
Les seuils
décidant du statut ZEP ne sont pas définis en fonction de critères sociaux ou
pédagogiques. Dans notre académie, personne ne se pose la question de savoir à
partir de quel taux de CSP- et quel effectif de classe la situation se dégrade.
Personne ne va voir dans les établissements si un surcroit de moyens est
nécessaire (ou pas).
La question
n'est pas définir formellement quels sont les seuils pertinents, la méthode du Rectorat
est aussi brutale qu'injuste : si on a une enveloppe pour N établissements, les
seuils correspondront simplement aux indicateurs du Nième établissement le plus
défavorisé, que les suivants aient des besoins ou non.
Selon cette
logique comptable, le collège Valmy ne sera pas en REP l’année prochaine. Avec
40% d’élèves boursiers, 32% d’élèves issues de familles défavorisées, 18% d’élèves
en retard scolaire à l’entrée en 6e, 58% de réussite au brevet des
collèges 2013 (85% de moyenne nationale, 82% sur l’académie de Paris), il n’est
pas considéré comme suffisamment défavorisé pour conserver son statut.
Notre position
La révision
régulière des statuts des établissements et de l’attribution de moyens
supplémentaires est une nécessité. La situation sociologique des quartiers et
des établissements évolue et les moyens doivent logiquement être redistribués
en conséquence. C’est une question de bonne gestion et surtout de justice
sociale. Nous ne sommes donc pas opposés à ce que des moyens soient retirés aux
établissements qui n’en ont plus besoin pour être transférés à ceux qui en ont
besoin.
Ce que nous
ne pouvons pas accepter, en revanche, c’est que cette redistribution se fasse
aux dépends d’établissements dont les besoins sont avérés.
Ainsi, nous
aimerions que le statut REP soit accordé en fonction des situations absolues et
non de la position relative des établissements sur l'échelle des difficultés
sociales. Nous considérons que le collège Valmy doit être en REP parce que des
années de travail commencent à porter leurs fruits et que, contrairement à ce
qu'affirme le rectorat, la situation n'est pas encore consolidée. Plus
largement, nous considérons que le statut REP doit profiter à toutes les écoles
qui accueillent massivement des élèves issus de familles défavorisées, comme
Louis Blanc ou Eugène Varlin, entre autres.
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